Aux Etats-Unis, en Europe et tout particulièrement en France voisine, puis même en Suisse, des étudiants se mobilisent sur des campus universitaires au sujet de la guerre israélo-palestinienne, en faveur des Palestiniens.
Disons-le d’entrée de cause, aucun de ces mouvements n’est spontané.
Tous ces mouvements sont propalestiniens ; ceux des Etats-Unis et de France sont instrumentalisés en fonction d’élections importantes. En Suisse, la « spontanéité » a imité les mouvements étrangers et attendu peut-être aussi les débats au sujet de l’UNRWA.
Reprenons les choses de plus près
Aux Etats-Unis, directement engagés dans la guerre par le soutien réitéré de M. Biden à Israël – et ses simagrées de menaces de retirer ses livraisons d’armes s’il n’y pas de cessez-le-feu -, il s’agit d’intervenir dans l’élection présidentielle, d’affaiblir M. Biden au profit des Républicains, voire de mettre du désordre au sein du mouvement démocrate déchiré entre une fidélité à son président et un soutien de la gauche palestinienne. Il faut préciser que l’électorat juif lui-même est assez composite, la jeunesse juive n’étant souvent pas sioniste, si j’en crois certains connaisseurs. Et puis, sur fond de rappel de la guerre du Vietnam, il y a l’inquiétude de l’énorme coût financier d’une aide militaire à Israël qui s’ajoute aux milliards récemment votés pour l’aide à l’Ukraine. Un peu de désordre sur les campus, toujours suivi de réactions policières « à l’américaine », c’est-à-dire sans le moindre «sens de la mesure », c’est « bon à prendre » pour éventuellement faire avancer une cause électorale qui n’a pas grand-chose à voir avec les malheureux Palestiniens. Les citoyens « Lambda » n’aiment ni le désordre ni les violences. Ils voteront pour le candidat aux élections présidentielles qui promettra sérieusement un cessez-le feu ou mieux, l’aura conclu.
En France, la Gauche insoumise a un terrible besoin de « remonter le terrain » par rapport au Rassemblement national qui marque des points alors que les élections européennes approchent. Une apparente générosité et une sensibilité humanisante à l’égard de la terrible – et c’est hélas ! exact – situation des Palestiniens de la bande de Gaza font bien dans le paysage. Personne ne s’inquiète des causes réelles de cette situation ni du fait que les pays arabes ne se pressent pas au portillon pour accueillir leurs « frères et sœurs » palestiniens ou hébergent certains chefs du Hamas. Peu importe ! Pour les mouvements universitaires français, c’est l’occasion de demander la punition des universités et des universitaires israéliens et d’y mêler en toute bonne conscience de l’antisémitisme – déjà très rampant en France, notamment dans les écoles publiques.
Quant aux universités suisses, laissez-moi pleurer de déception. En toute « spontanéité », les étudiants demandent, pour obtenir la protection des Palestiniens, la rupture de toute relation avec des institutions de recherche israéliennes (à l’EPFL), ou avec des universités israéliennes (notamment à Unil). On se réjouit que l’UNIL ait pu organiser, par les soins de la faculté de théologie – ce que d’aucuns n’ont pas hésité à critiquer vertement, voire à envisager de saboter, prétextant que c’était faire croire qu’il s’agissait d’une guerre de religion ! – et réaliser un débat contradictoire entre un professeur de judaïsme et un professeur de l’islam. Un tel débat (qui se poursuivra le 23 mai) correspond au vrai rôle d’une université, c’est-à-dire informer, développer les échanges en vue d’une compréhension et d’un respect réciproques, seule voie éventuelle vers la paix. Mais les autorités de l’UNIL ont déjà failli à leur responsabilité en permettant à un groupe d’étudiants d’occuper certains locaux pendant deux jours et d’y dormir, d’y représenter exclusivement un mouvement « pro-palestinien » et d’y accueillir certains professeurs soutenant la demande de boycotter les relations avec des universités israéliennes. De quel droit des étudiants logeraient-ils dans des locaux universitaires pour réclamer la punition d’autres universités ? Non ! L’université n’est pas le lieu d’une manifestation unilatérale, mais celui d’un accès à la connaissance et notamment à la connaissance des faits, des différentes manières de les comprendre voire de les établir et de débattre des preuves.
Si les mouvements étudiants étaient spontanés et généreux, ils seraient capables d’écouter les deux parties et sauraient qu’il est totalement injuste de punir la population civile estudiantine israélite en réclamant le boycott de ses universités pour obtenir un cessez-le feu. Quant à prétendre que ces mouvements sont pacifiques, c’est le vieux truc bien rôdé des révolutionnaires : on occupe – sans armes – des lieux qui ne sont pas affectés à cet usage et on refuse de les quitter ce qui risque d’obliger les responsables à les libérer de force et comme cela, ce sont les autorités qui ont l’air violentes.
En résumé
Le Hamas savait que les km de galeries creusées à Gaza sous des hôpitaux, des écoles, etc. seraient la cause de dommages atroces pour la population civile en cas d’attaque israélienne et a provoqué cette attaque par le massacre du 7 octobre ; M. Netanyahou martyrise la population civile palestinienne pour essayer de vaincre le Hamas partiellement réfugié ailleurs ; et les étudiants des différentes universités américaines, françaises et suisses réclament la punition de la population civile universitaire israélienne pour sauver la population civile palestinienne, voire favorisent simplement l’antisémitisme. Simultanément, des chefs politiques des belligérants se préoccupent avant tout de leurs intérêts personnels (élection personnelle pour l’un, protection contre les procès et la destitution pour l’autre, dissémination chez des voisins pour un troisième) en récupérant la naïveté et l’énergie des jeunes ! C’est bien toujours la population civile qui est prise en otage et ce sont les jeunes que l’on instrumentalise ! Rien de nouveau sous le soleil !