Pas de neutralité crédible sans une armée crédible

La démission de Mme Amherd qui a passé toutes ses années au Conseil fédéral à la tête du même département, celui de la défense et des sports, invite fort opportunément à dresser un bilan de l’état de notre armée. La Conseillère fédérale partante a assurément eu le mérite de réussir à faire voter le principe de l’achat d’avions de combat (le principe seulement, pas la marque, car ce n’est évidemment pas le peuple qui est à même de juger de l’adéquation de l’appareil commandé avec les besoins précis de la défense aérienne !) et, tout récemment, à obtenir une « rallonge » pour le budget de l’armée. Ce sont incontestablement des points positifs à son actif.

Savoir si la féminisation de l’armée est un « plus » ou non, reste une question indécise, dans la mesure  où ce qui est déterminant c’est d’avoir un corps militaire suffisant pour une armée crédible. La féminisation ne doit pas avoir pour but de compenser l’attraction du service civil. La première question reste de préciser à quoi sert ce dernier, en dehors du cas exceptionnel du respect d’une impossibilité éthique, philosophique ou religieuse honnête de servir dans l’armée. Quant à savoir ce que signifie « le »jour de service obligatoire évoqué tout récemment permettant aux femmes d’être renseignées sur le rôle et la fonction de l’armée, c’est éventuellement une idée défendable, mais quel serait le rapport coût/bénéfice ? Et vaut-il vraiment la peine d’élever ce jour purement informatif en « obligation constitutionnelle » ?

 

Mais au fait, à quoi sert notre armée ?

Voilà le sujet qui n‘a jamais été abordé publiquement ni  clairement. Son premier but n’est certainement pas de nous permettre de rentrer dans l’OTAN.

Sa raison d’être est de rendre crédible notre neutralité. L’Etat neutre doit prouver sa volonté et sa capacité de se défendre, de protéger sa population et son territoire s’il est attaqué . La neutralité ne permet pas d’avoir l’air, puisqu’on cherche la paix, de s’en remettre aux autres pour sa défense. Elle exige une armée de qualité par son nombre, par sa formation et par son armement.

Une difficulté subsiste, cependant, à cause de la situation géographique de notre Pays au cœur de l’Europe et notamment des pays de l’Europe groupés au sein de l’OTAN.  Quid si, contre sa volonté, notre pays était menacé par un Etat non membre de l’OTAN ou pris dans la tourmente d’attaques dirigées contre ses voisins et s’il devait se défendre avec ou en même temps que ses voisins ? Il serait évidemment judicieux qu’il puisse le faire utilement, qu’il ait donc une certaine aptitude à collaborer, par l’armement et par la formation. Cela implique des contacts professionnels entre la Suisse et l’OTAN, mais évidemment jamais une participation à des exercices d’intimidation par rapport à un ennemi précis et toujours une position parfaitement claire de non appartenance à l’OTAN. C’est une situation délicate qui implique une doctrine et une volonté déclarées de neutralité. Aucune ambiguïté ne peut être tolérée. Or c’est nettement l’ambiguïté qui a régné pendant ces années, accentuée encore par les maladresses du Conseil fédéral depuis l’invasion de l’Ukraine. Il faudrait redresser la barre sans tarder. Il n’est pas certain que la conseillère fédérale sortante soit motivée pour cela.

 

Des drones inutiles ou viciés.

La RTS nous informait, le 6 janvier, que nous avions commandé à et reçu de l’Etat d’Israël pour 300 millions, des drones qui ne fonctionnent pas et qui ne seraient d’ailleurs pleinement fonctionnels que dans plusieurs années. Et alors ? Que fait-on de ce matériel défectueux et inutile ? Pas un mot des mesures à prendre, ni du coût des corrections de ce vice ? Pas un mot sur les auteurs de la commande ou de la livraison. Je n’ose imaginer ce qui aurait été dit si le matériel avait été américain ou – horreur ! – chinois ou russe !

Savait-on à l’avance que ce matériel serait défectueux ? Pourquoi n’avons-nous reçu que 4 appareils sur 6 commandés ? Qui a fait la commande ? Comment l’Etat d’Israël justifie-t-il les défauts et le retard dans la livraison ? A ma connaissance, la Suisse n’est pas un Etat en guerre, donc rien ne justifie une retenue dans l’exécution de la commande. On a envie de dire : « dommage qu’Israël reçoive des armes des Etats-Unis, car s’il ne dépendait que des siennes, il y aurait peut-être moins de morts à Gaza ».

De qui se moque-t-on, chez nous, au Département fédéral de la défense ? L’incompétence crasse des responsables explique peut-être la tendance au rapprochement de l’OTAN en violation de l’art. 185 al. 1er de la constitution : « Le Conseil fédéral prend des mesures pour préserver l’indépendance et la neutralité de la Suisse ».

Mais il faut dire que, pour être neutre, il faut avoir une colonne vertébrale, du courage et un sens de l’honneur. Or, comme le disait Alexandre Soljénitsyne en juin 1978, dans son discours à Harvard, « le déclin du courage est particulièrement sensible dans la couche dirigeante »[1]. Et j’ai envie d’ajouter : « les embrassades entre Hommes (Femmes !) d’Etat lors de rencontres internationales sont en général des baisers de Juda ».

[1] Alexandre Soljénitsyne, « Le déclin du courage » Paris, Les Belles Lettres/Fayard 2023.

L’écologie du gaspillage et des déchets

Interdiction de rouler avec une voiture d’un certain âge, obligation de remplacer les voitures à essence ou diesel par des voitures électriques, obligation, dans un  délai de quelques années, de remplacer tout  chauffage électrique par une pompe à chaleur ou du solaire, bref, jetez, gaspillez, accumulez les déchets au nom de la protection de l’environnement et de la lutte contre le réchauffement climatique.

Sous la coupe peut-être de certains lobbies et sous le charme des thuriféraires de la cause anthropologique du réchauffement climatique, plusieurs de nos autorités cantonales, communales, voire fédérales, s’acharnent à inciter au gaspillage et à l’accumulation de déchets. Que faut-il faire en effet des nombreuses voitures à mettre au rebut ? Des résidus de la démolition de chauffages, de maisons éventuellement, aux fins de satisfaire aux injonctions officielles dont on sait déjà – car on l’a vécu à plusieurs reprises – que, dans quelques années, elles se rendront compte qu’elles s’étaient trompées et changeront leur fusil d’épaule, exigeant de nouveaux changements, causes de nouveaux tas de déchets.

Et tout ce gaspillage destructeur parce que des scientifiques refusent d’entendre les questions, les constats et les preuves d’autres scientifiques qui ne sont ni plus bêtes ni plus ignorants qu’eux, mais qui ont conservé leur esprit critique et peut-être leur indépendance  économique.

Comment avons-nous pu en arriver là ? Les dégâts causés par une théologie de la cause du réchauffement climatique sont immenses, bien pires que ceux induits réellement par ledit réchauffement : c’est en effet, outre le gaspillage et les déchets, le développement sournois d’une forme de dictature du « bien » et le mal-être  des générations montantes qui ne savent même plus si cela vaut la peine d’avoir des projets d’avenir.

Cette forme d’écologie est une énergie de mort qui sème le désespoir et exige une soumission castratrice.

 

Comme cadeau de nouvelle année: un magnifique roman historique

Le roman historique est une des formes littéraires les plus difficiles :  il implique une maîtrise de l’histoire, une restitution socio-culturelle de l’époque où se situe l’intrigue,  une langue à la fois moderne et adaptée néanmoins au temps évoqué. Réussir le tout équivaut à un tour de force. C’est le pari gagné par Mme Lise Favre dans son 2e roman, « La colombe et l’épervier » qui vient de paraître aux éditions Infolio.

Dans l’atmosphère très particulière de la première moitié du 12e siècle européen, sur un fond historique ô combien mouvementé, on suit la vie passionnante d’une Marie de France qui – selon l’auteure – « a réellement existé , mais dont on ignore sa filiation et ses dates de naissance et de mort ». Cette ignorance permet à l’auteure de donner libre cours à son imagination tout en reconstituant fidèlement l’atmosphère courtoise et violente, fastueuse et rude des milieux de Cour et de noblesse du temps d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II Plantagenêt. Les personnages imaginaires ont des noms totalement plausibles et sont présentés dans une liste en fin d’ouvrage où ils alternent avec les personnages réels dont la filiation et le rôle historique sont brièvement rappelés.

L’ouvrage se termine sur l’annonce de la suite à venir que l’auteure est déjà en train de rédiger. La véritable épreuve, c’est de devoir attendre cette suite !