De l’auto goal des sanctions économiques

On le sait de très longue date, les sanctions économiques contre un Etat sont rarement efficaces. L’ancien président américain, M. Obama, l’a d’ailleurs fort bien dit dans son livre « Une terre promise ». Le Temps vient de publier la reconnaissance « officielle » de cette vérité, en ce qui concerne les sanctions prises par les pays occidentaux contre la Russie.

Les sanctions ont pour but de nuire avant tout à la population civile afin qu’elle renverse le pouvoir

Ce double but est à la fois non éthique (les sanctions doivent atteindre la population civile qui souvent n’y peut mais, et nuisent en particulier aux plus pauvres ; en outre, provoquer une éventuelle guerre civile dans un Etat n’est certainement pas une démarche éthique, c’est mettre beaucoup de vies en danger) et inutile (dans un régime totalitaire, les soulèvements politiques sont très dangereux pour les personnes courageuses qui osent réagir et le renversement d’un dictateur n’est pas la garantie de son remplacement par un régime libéral !).

Les sanctions financières contre la Russie frappent aussi des oligarques, donc des personnes privées, riches, présumées coupables sans appel au point que certains Etats sont prêts à s’approprier ces biens privés pour les affecter selon leur « bon cœur » donnant ainsi un exemple catastrophique d’abus de droit « au nom du Bien » dont ils se croient les représentants exclusifs.

 

Les sanctions nuisent souvent au moins autant à ceux qui les prennent qu’à ceux qui les subissent

C’est exactement ce qu’il se passe actuellement. Les Etats européens souffrent considérablement des conséquences des sanctions prises. Les Etats-Unis, eux, se frottent les mains car ils se substituent aux fournisseurs d’énergie ou de matières premières sanctionnés et menacent (sanctionnent?) les banques et Etats européens qui, selon eux, ne vont pas assez loin dans la punition des oligarques (toujours « l’axe du Bien contre l’axe du Mal !!!).

Notre Pays a presque bradé sa neutralité à cause des sanctions qu’il a « reprises servilement » au lieu de se contenter de « prendre, vu sa neutralité, des mesures permettant d’éviter de profiter des conséquences des sanctions décidées par d’autres ». C’est la grande difficulté de la neutralité face aux sanctions économiques décidées par d’autres Etats non neutres. Il est plus difficile d’être neutre économiquement que militairement. C’est là qu’intervient l’art de la communication où nous échouons en général par peur du qu’en dira-t-on.

Les sanctions nous nuisent comme aux autres Etats européens. Puissions-nous au moins résister farouchement à la « tentation » de « faire le bien » en spoliant, sans aucun respect du droit, de légitimes propriétaires (même russes !) de leurs biens ou des revenus de ceux-ci. Et si l’oncle Sam ou les Etats de l’UE froncent les sourcils, haussent la voix et nous montrent du doigt, répondons-leur que nous défendons les « valeurs occidentales » auxquelles ils sont si attachés. Ce serait peut-être un pas vers la paix moins inutile que la rencontre du Bürgenstock !

 

 

 

 

Peut-on critiquer la politique de tous les États sauf celle de l’État d’Israël?

C’est un phénomène assez étonnant : on peut critiquer n’importe quel État pour sa politique étrangère ou même parfois sa politique intérieure, mais si on critique la politique de l’État d’Israël, on est immédiatement accusé d’antisémitisme. Je ne comprends pas pourquoi.

L’attaque du 7 octobre par le Hamas était épouvantable, mais la violence et la cruauté de la destruction de la bande de Gaza est de même nature sinon pire par la disproportion. Chacun des deux belligérants a en outre sa propagande mensongère  comme dans toute guerre et personne ne croit que l’on puisse vraiment détruire le Hamas dont les têtes principales se trouvent à l’abri dans des États voisins et dont l’idéologie échappe hélas à toute destruction car elle repose exclusivement sur la haine. On dira même, au contraire, que la haine attise la haine et en sème les graines – souvent religieuses – ce qui ne laisse rien présager de vraiment paisible après la fin des combats.

La guerre est généralement déclenchée par les chefs politiques (quelquefois sous un prétexte : la fameuse « dépêche d’Ems », en 1870 ; l’attentat de Sarajevo  en 1914) et non par le peuple. Celui-ci sera toujours divisé entre ceux qui voudraient gagner « quoi qu’il en coûte » et ceux qui espèrent la paix et œuvrent même pour l’obtenir, peut-être aussi « quoi qu’il en coûte ». Mais les attaques et les actions sont décidées et exigées par les chefs, parfois d’ailleurs pour sauver leur tête ou leur poste ou satisfaire leur ego plus que par amour de leur pays ou de leurs concitoyens.

Alors, pitié, ce n’est pas parce que l’on désapprouve M. Netanyahou et la guerre actuelle de l’Etat d’Israël ou que l’on vient en aide aux Palestiniens en grande souffrance de la bande de Gaza, ni parce que l’on considère qu’en détruisant le consulat iranien à Damas, l’État d’Israël  a  provoqué l’Iran qu’on est antisémite.

Ma sympathie va aussi profondément aux familles israéliennes dont des membres sont encore otages ou ont été massacrés le 7 octobre qu’aux familles palestiniennes chassées de leurs maisons détruites, pleurant leurs blessés et leurs morts et souffrant de la faim, de la soif ou de maladies non soignées.

Quand donc prendront fin la folie sanguinaire et l’esprit de vengeance des uns et des autres ? Quel rôle jouent M. Biden, les conseillers qui le manipulent et certaines têtes politiques occidentales, russes, ou orientales qui dansent autour de la grenade dégoupillée israélo-palestino-iranienne ? Toutes ces questions n’ont rien à voir avec de l’antisémitisme, elles relèvent simplement du bon sens. Et le bon sens n’est pas haineux.

 

Strasbourg, ça suffit!

Le jugement récent de Strasbourg concernant la Suisse dans le domaine de la lutte contre le réchauffement climatique est une consécration de l’arbitraire.

Dans un pays démocratique, le juge ne contrôle une décision politique et strictement politique – telles que les questions relatives à la politique de l’environnement – que si cette question porte atteinte aux droits fondamentaux de la personne. En effet, les mesures politiques sont très souvent des mesures essentiellement dictées par l’appréciation momentanée des faits. Un tribunal suprême, tel celui de Strasbourg, qui n’est pas un tribunal du fait mais du droit ne revoit le droit que sous l’angle d’une appréciation arbitraire des faits.

Ce n’est pas parce qu’une mesure politique déplait à une minorité qu’elle est a priori arbitraire.

En Suisse, où les lois sont soumises au contrôle populaire à chaque niveau politique, il faut que l’application soit entachée d’un lourd arbitraire pour que le juge puisse intervenir. Et le Tribunal fédéral est très attentif, dans ses jugements, à éviter les dérives qui sont la porte ouverte à l’arbitraire.

En matière de politique environnementale ou climatique, les appréciations de fait ne cessent pas de se modifier : au nom de cette appréciation, les autorités ont conseillé les voitures diesel puis les ont déconseillées, incitent à troquer les voitures à essence contre les voitures électriques, mais s’inquiètent des problèmes environnementaux liés aux déchets et aux métaux précieux, ont incité au chauffage électrique, puis l’ont interdit, ont recommandé le gaz, puis, pour des raisons purement politiques, l’ont fortement déconseillé, recommandent les panneaux solaires mais les interdisent sur des bâtiments historiquement protégés, etc…

Bref, les pesées d’intérêts varient et les citoyens son ballotés au nom d’une protection à propos de laquelle la science n’est nullement absolue.

Que des juges hors sol se mêlent de revoir des options qui relèvent strictement d’appréciations locales témoigne simplement du caractère non juridique d’une lutte contre des phénomènes climatiques dont personne n’a la maîtrise ni ne comprend parfaitement la cause. Il se trouve que la politique exige la connaissance et la prise en compte de beaucoup de paramètres pour que des mesures soient adaptées à une société et ne causent pas plus de dégâts humains qu’elles n’assureraient de protection.

 

Quant à prétendre – comme on l’a entendu à l’émission Forum de la RTS hier soir 9 avril où était rapporté ce qu’auraient dit les juges de Strasbourg – que l’inaction climatique est une violation des droits de l’homme et que la protection climatique est un droit fondamental, c’est d’autant plus inquiétant que cela consacre une toute puissance aux prétentions scientifiques et aux lobbies qui savent en profiter.

Mensonge de l’OTAN ou de la RTS?

L’OTAN fête son 75e anniversaire en montrant ses biceps et bombant le torse. Son secrétaire général, M. Stoltenberg, célèbre « l’Alliance la plus forte et la plus couronnée de succès de l’histoire ».
Et notre RTS évoque naturellement aussitôt (4 avril à 12h45) les manœuvres impliquant un énorme déploiement de forces qui se déroulent en ce moment en Roumanie et qui sont censées répondre à une attaque imaginaire d’un ennemi « de force égale, qu’on ne nommera pas ».

Citation tronquée de l’art. 5 du Traité de l’OTAN
Evoquant la justification du soutien des pays de l’OTAN à l’Ukraine, la RTS montre le texte flouté et illisible de l’art. 5 du Traité de l’OTAN, en en reproduisant l’extrait suivant:
«Une attaque armée survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les Parties ».
Cette citation, mise en évidence sur une texte flouté du Traité, est tronquée.
L’art. 5 dit en réalité : « Les Parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une d’elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les Parties et en conséquences, elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’art. 51 de la Charte des Nations Unies, assistera la Partie ou les Parties ainsi attaquées… ».

Est-ce la RTS qui a menti ou n’est-elle que le valet de l’OTAN ?
Dès le début de l’invasion de l’Ukraine, je me suis demandé pourquoi l’OTAN – donc les pays de l’Union européenne en plus des USA – soutenaient l’Ukraine qui n’est pas membre de l’OTAN (raison sans doute pour laquelle la Russie l’a attaquée, avant qu’elle le devienne).
Ce soutien – dont on apprend qu’il a été « officiellement justifié » par une lecture truquée du Traité de l’OTAN – n’a d’autre but que la glorification espérée des USA sous couvert de l’OTAN.

Le soutien de l’OTAN est un soutien aux dépens de l’Ukraine et de l’Union européenne.
Craignant à juste titre l’éclatement d’une 3e guerre mondiale, l’OTAN (M. Biden) interdit à l’Ukraine d’utiliser les armes reçues pour causer des dommages à l’intérieur de la Russie ; or la défense efficace du pays attaqué passe aussi par la contre-attaque dans le pays attaquant. L’interdiction faite à l’Ukraine la condamne à perdre, ce qui est déjà le cas. M. Biden le sait mais pour lui qui, avec les faucons qui le mènent par le bout du nez, a déclaré dès le début de l’invasion « il faut écraser la Russie », il est nécessaire de faire durer le martyr des Ukrainiens jusqu’aux élections afin de pouvoir mettre tout échec sur le dos des Républicains, quel que soit l’élu final.
Et pendant que l’Amérique et M. Stoltenberg se vantent de la force et des succès de l’OTAN, les Ukrainiens meurent, leur pays se dépeuple et se transforme en un champ de mines et de ruines et l’Union européenne s’appauvrit, doit reconstituer son propre arsenal à ses frais et se demande si elle va suivre ses « va-t-en guerre ».

La RTS, elle – par sottise ou par aveuglement ? – se fait l’alliée des menteurs, fauteurs de morts, en reproduisant un texte tronqué, tandis que la Suisse trahit sa neutralité au bénéfice des menteurs. Mais nous réveillerons-nous une fois ?

L’église de l’inclusion, oui! Mais de l’inclusion de quoi?

L’Eglise évangélique du Canton de Vaud (EERV)a fait parler d’elle dernièrement pour avoir organisé une « soirée de réflexion à Lausanne » (titre dans 24H du 14 mars, p. 5), in casu « une soirée thématique sur l’éthique du BDSM » (même source).
Pour ceux d’entre vous qui, comme moi, ont besoin d’un petit rafraîchissement de la mémoire parce que leur catéchisme est ancien, BDSM signifie « bondage, discipline, domination, soumission et sadomasochisme). Cela vous rappelle-t-il la préparation de votre Confirmation ? Bon ! Le monde change !…..
On apprend en lisant l’article de 24 H que l’invitation à la soirée émane de la « Plateforme des « inclusivités LGBRIQ+ », groupe de parole et de partage en actions au sein de l’EERV. Je précise qu’il s’agit d’une nouveauté qui date de la campagne de votation en relation avec « le mariage pour tous ». L’un des conseillers synodaux (membre de l’exécutif de l’EERV) nous apprend, toujours grâce à 24H, qu’il a reçu mandat du Conseil synodal (dont il est membre) pour que se mette en place un « espace de réflexion sur les questions d’inclusivité et de conjugalité ».

Ne pas confondre l’inclusion des personnes avec l’inclusion des moeurs
La notion d’Eglise de l’inclusion a été développée soudainement à l’occasion précisément de la campagne de vote concernant le mariage pour tous. De manière surprenante, l’Eglise a découvert alors qu’elle devait être « inclusive ». Je croyais bêtement depuis longtemps que, conformément à ses principes constitutifs, l‘EERV ne faisait pas « acception de personnes », c’est-à-dire, était « inclusive », mais je commettais une grosse erreur. Il ne s’agit pas de pratiquer l’inclusion des personnes, mais l’inclusion des mœurs. C’est cela la nouveauté.

Inclusion des personnes ou inclusion des mœurs ?
Depuis que l’EERV s’est proclamée Eglise de l’inclusion, le malentendu s’est installé. Quel est exactement le mandat reçu par le conseiller synodal chargé de mettre en place un espace de réflexion sur les « questions d’inclusivité et de conjugalité » ? Lors de la très prochaine session du Synode de l’EERV, il est impératif que les membres s’enquièrent de la portée précise du mandat et surtout de la différence que l’EERV fait – ou ne fait pas – entre l’inclusion des personnes et l’inclusion des mœurs.
Le malaise est si grand, parmi les fidèles, à cause de cette confusion, qu’il est temps de mettre les choses au clair avant que les Eglises ne soient plus que des lupanars.

Les « valeurs occidentales » mais… quelles « valeurs »?

La présomption de culpabilité qui justifie non seulement le gel des avoirs de personnages russes présumés soutenir un régime politique – certes détestable – celui de M. Poutine, puis non seulement le gel mais peut-être la confiscation et l’affectation des intérêts de ces biens à la réparation des dommages de la guerre en Ukraine est-ce une « valeur occidentale » ? Certes, l’Ukraine a été attaquée par la Russie, mais elle ne l’a pas été directement par MM. et Mme tel et tel. Le gel des biens, puis éventuellement la confiscation des revenus et l’affectation de ces derniers à un pays, fût-il attaqué par le Gouvernement du pays dont les propriétaires des fonds gelés sont originaires, sont-ils des sanctions pénales ou civiles ? Dans le cadre de quel procès ? Ce ne sont que des sanctions politiques, arbitraires. L’arbitraire est-il une « valeur occidentale »?

Et pendant ce temps, Mme von der Leyen peut cacher aux Etats de l’UE les montants engagés sans mandat ni pouvoir envers Pfizer pour les milliards de vaccins commandés et personne ne considère qu’il s’agit d’une dilapidation éventuellement d’un détournement de biens publics. Est-ce une « valeur occidentale » ?
Et pendant ce temps toujours, M. Assange est peut-être menacé d’extradition de la part du Royaume-Uni et d’une peine de 175 ans d’emprisonnement aux USA, pour avoir dénoncé et prouvé des crimes contre l’humanité commis par des soldats de l’armée américaine, mais personne ne souhaite parler de ces crimes alors que l’on énumère ceux prétendument – c’est hélas ! possible, mais non encore prouvé – par des soldats de l’armée russe. Deux poids, deux mesures : est-ce une « valeur occidentale » ?
Et pendant ce temps l’Ukraine, autant que la Russie, est connue comme un Etat où fleurit la corruption, mais elle est dans le camp « du bien ». Est-ce une « valeur occidentale » que de distinguer la corruption des « justes » de celle des « méchants ?

Non ! Ne parlez pas des « valeurs occidentales », mais considérez simplement que toute guerre est une catastrophe et que seuls ont encore des valeurs ceux qui mettent toute leur intelligence, leur énergie et leur honnêteté dans la recherche d’une solution de paix au risque de se faire accuser par les va-t’en guerre de « négocier avec le diable » et de n’encourir que le mépris des « purs ».

Y aura-t-il des limites à la vengeance?

Oui, l’attaque du Hamas le 7 octobre a été atroce, mais combien de temps et au prix de combien de morts, de combien de souffrances imposées à des civils, à des enfants en particulier, a-t-on le droit de « se venger » ? Parce qu’il faut quand même appeler les choses par leur nom, les souffrances imposées aux Gazaouis ne sont plus de la légitime défense, c’est de la vengeance, vengeance par dépit de n’avoir pas su prévenir l’horreur du 7 octobre, vengeance personnelle peut-être de M. Netanyahou, qui se protège derrière la cruauté du Hamas et néglige d’ailleurs les otages de son propre pays encore aux mains du Hamas (ou les saurait-il déjà tous morts dans la bande de Gaza ?).
Quels pays arriveront à rappeler M. Netanyahou et les chefs du Hamas à la raison ? Quand est-ce que les USA, M. Biden en tête, cesseront leur double jeu ? Que fait notre pays, gardien des Conventions protégeant les populations civiles? De qui avons-nous peur ? De l’Etat d’Israël ? Des pays arabes ? Les Pays européens n’ont pas le droit de se taire. Ce n’est plus une question politique. C’est devenu un problème strictement humanitaire devant lequel tout silence est un acte de complicité.

L’art difficile de se taire en public

Plusieurs anciens conseillers fédéraux avaient jugé nécessaire de s’exprimer publiquement au sujet de l’initiative populaire relative à la 13e rente AVS. Pour quelle raison ?
Ils ont certes, chacun, le droit d’avoir une opinion et ils sont, chacun, un citoyen à 100 %, mais était-ce élégant, voire correct, de prendre une position publique, celle-ci fût-elle analogue à celle de leurs collègues en fonction ? Quand on ne peut pas échapper à son titre officiel (ici, d’ancien membre du Collège fédéral) on ne peut pas prendre une position publique où précisément ce titre joue un rôle.
Et si, à une autre occasion, ces mêmes anciens conseillers fédéraux sont en désaccord avec la position du Collège exécutif en fonction, leur simple refus ou silence donnera lieu à des exégèses variées, à des interprétations fantaisistes ou à des spéculations trompeuses ou erronées.
Une fois de plus, la discrétion – si peu conciliable avec la notoriété – aurait été une qualité : « servir et disparaître ».

Cette attitude de quelques « anciens » met en évidence une grosse faute politique que je ne cesserai jamais de dénoncer : le fait que le Conseil fédéral continue à vouloir engager l’un ou l’autre de ses membres dans la campagne précédant une votation fédérale, oubliant que ce n’est que la décision du Parlement, éventuellement celle du peuple, qui est sujette au vote, jamais directement celle du Conseil fédéral. Lui, le Conseil fédéral, il devra tirer les conséquences de la décision populaire finale et, éventuellement, la mettre en pratique. Point final.
Il n’est jamais favorable à la confiance en l’Exécutif que le peuple se sache en désaccord flagrant avec cet Exécutif, à cause du résultat du vote. Le désaccord avec le Parlement n’est pas grave, car le Parlement n’exerce pas le pouvoir, il assure (plus ou moins bien) la représentation populaire. Quand la majorité du Parlement est désavouée, après un vote, c’est l’Exécutif qui en subit les conséquences. C’est la règle du jeu dans une démocratie comme la nôtre. C’est bien là l’exceptionnelle difficulté de notre système constitutionnel, qui échappe totalement aux Etats européens et à la vanité de certains membres ou anciens membres d’exécutifs et qui déplaît à la Presse, avide toujours de personnes de pouvoir à encenser ou assassiner.

Cette fois, ce sont les auteurs de l’initiative pour une 13e rente AVS qui ont gagné. Les opposants, comité d’opposition, majorité parlementaire, ont perdu. Le Conseil fédéral, lui, devra proposer au Parlement la manière de mettre en œuvre le texte voté et d’assurer le financement de l’AVS tout en tenant compte de l’état des finances publiques. Et si la solution proposée par le Conseil fédéral n’agrée pas au Parlement et que celui-ci en vote une différente, ou même si la solution du Conseil fédéral est acceptée par le Parlement, le peuple pourra toujours lancer un referendum et le Conseil fédéral puis le Parlement devront, éventuellement, remettre l’ouvrage sur le métier. Pourquoi le Conseil fédéral perdrait-il du temps à défendre les décisions du Parlement – éventuellement contre la volonté populaire – pendant la Campagne référendaire ?

« Négocier avec le diable »

C’est sous ce titre que M. Pierre Hazan a publié, en 2022, aux éditions «Textuel », un passionnant petit fascicule dont il a été question à l’émission « Géopolitis » de la RTS du dimanche 14 janvier dernier.
Cette émission – et le livre de M. Hazan – devraient être étudiés par nos parlementaires et nos conseillers fédéraux avant les débats concernant la future éventuelle « loi interdisant le Hamas et les organisations apparentées » et mieux encore par tous ceux qui entendent répondre à la procédure de consultation en cours.
M. Hazan ne m’en voudra certainement pas de citer trois courts extraits de son livre :

P. 15 : « …en quittant le journalisme, puis les Nations Unies, où je fus même brièvement conseiller politique de la haute-commissaire pour les Droits humains, je me retrouvais impliqué dans des processus de paix et je m’entretenais courtoisement avec des gens qu’auparavant je vilipendais de ma plume…. La recherche de la paix avait désormais pris le pas sur la recherche de la justice. J’abandonnais l’éthique de conviction et la dénonciation des criminels de guerre pour l’éthique de responsabilité. L’idée d’être forcément du côté du bien dans l’éthique de conviction ne me satisfaisait plus, car elle me semblait détachée de la nécessité d’affronter la réalité de la vie internationale faite de compromis insatisfaisants et de pragmatisme, alors que je voulais continuer d’agir conformément à ma conscience. Cela supposait de se tenir sur un chemin de crête sans verser ni dans le pragmatisme cynique ni dans un angélisme naïf qui aurait été contre-productif. Pour reprendre une expression anglaise, la paix est un messy business ».

P. 17 : « … Depuis longtemps, j’ai abandonné le confort de l’éthique de conviction, ce luxe d’être cohérent avec soi-même, pour assumer l’éthique de la responsabilité. Une éthique de la responsabilité tournée vers l’efficacité qui encourage le compromis et le pragmatisme, selon les aléas de l’action, au nom de la finalité recherchée. ».

P. 19-20 : « Dans ce livre, je n’ai pas cherché à répondre à [d]es questions insolubles, mais à cartographier les zones éthiques les plus dangereuses et les dilemmes qui s’y rattachent pour établir quelques repères. Avec l’ambition assurément démesurée de contribuer à fournir une boussole morale pour les médiateurs dans un monde violent et en pleine recomposition. »

M. Hazan décrit peut-être dans ces pages – et dans tout son ouvrage d’ailleurs – ce qui devrait être la réflexion fondamentale d’un pays neutre conscient de ses responsabilités internationales dans la recherche systématique de la paix, responsabilités qui exigent le courage et l’humilité de renoncer à l’éthique de confort qui se contente de crier avec les loups, pour passer à l’éthique de responsabilité qui exige une grande force morale.

Plaidoyer pour les personnes et les peuples

Un marchand de Davos a donc cédé à la tentation de l’antisémitisme. C’est désolant ! Cela ne fait malheureusement que confirmer la confusion constante opérée entre les chefs d’Etat et leur politique, d’une part, et les peuples qu’ils gouvernent, d’autre part.
Cette confusion, on la vit chaque jour et elle est malheureusement entretenue par les pouvoirs publics eux-mêmes souvent qui cherchent à plaire ainsi à une partie de la population.
N’a-t-on pas vécu au début de l’invasion de l’Ukraine, une hargne contre les artistes russes, les athlètes russes, les soupçonnant tous d’être des suppôts de leur chef. Les sanctions prises contre les avoirs russes dans les pays européens sont d’ailleurs de la même nature : je n’arrive pas à comprendre que des pays qui se disent démocratiques et respectueux des personnes aient pu prendre des sanctions financières ou simplement des mesures ostracisantes contre des personnes présumées coupables parce que russes in casu. Sans parler évidemment de la volonté de confiscation des biens que défendent certains. A la limite, que des fonds d’Etat russes soient gelés, on peut le comprendre – sauf de la part d’un Etat neutre – car le chef de l’Etat représente bien l’entité publique. Mais plus, NON ! En tous les cas pas sans un procès équitable préalable.
J’en reviens à la vague d’antisémitisme qui semble déferler depuis la guerre contre Gaza. Mais pitié, M. Netanyahou n’est pas « tout le peuple juif » et même si beaucoup de juifs orthodoxes le soutiennent politiquement, chacun ne représente que soi-même et non pas l’ensemble du peuple dont il fait partie.
De même d’ailleurs, le Hamas n’est pas l’ensemble du peuple palestinien.

Certes, on nous a beaucoup dit, quand j’étais gosse, qu’on devait se souvenir qu’on est ambassadeur de son pays quand on voyage à l’étranger, ce qui devait nous inciter à nous conduire convenablement, à titre personnel. Mais nous savions bien que nous ne représentions pas la politique de notre pays.

Malheureusement, l’atmosphère de haine que distillent les nouvelles de tous les conflits qui se déchaînent actuellement dans le monde attise les manifestations les plus violentes que justifie cette mode actuelle d’affirmer que chaque conflit est une lutte du bien contre le mal alors qu’un conflit n’est jamais qu’un conflit où souffrent et meurent les « bons » comme les « mauvais ».