Corruption à ciel ouvert

Cinq capitaines d’industrie, suisses, officiellement et publiquement reçus dans le bureau ovale du Président des Etats-Unis, en présence de celui-ci. Cinq capitaines d’industrie dont on apprend qu’ils ont offert de très beaux cadeaux à ce Président (une montre Rolex, un lingot d’or) pour essayer d’obtenir une baisse des droits de douanes infligés à leur pays, donc à leurs entreprises, comment qualifie-t-on cela ? De corruption active du côté des capitaines d’industrie, de corruption passive du côté du Président des Etats-Unis. Le tout, au grand jour, « ad majorem Dei gloriam ». Quelles conclusions en tirer ?

 

La première conclusion, c’est que l’économie est en train de mettre la politique et la diplomatie au rancart

Le développement de la globalisation et de toute la technique informatique (gonflée par l’IA), a permis aux grands de l’économie de devenir les premiers décideurs mondiaux. Seuls ont vraiment de l’influence ceux dont la richesse égale ou dépasse le PIB des Etats. Ils parlent les yeux dans les yeux avec les chefs d’Etat et ne cherchent d’entente qu’avec leurs égaux. Ils ignorent les frontières, les cultures, les libertés politiques. Ils veulent être les maîtres du monde et s’y emploient.

 

La deuxième conclusion est d’abord une question : Dans quelle mesure, côté suisse, le Conseil fédéral était-il au courant de la démarche économique et l’appuyait-il ?

Si c’était le cas, cela signifierait que le Conseil fédéral est composé de fins stratèges et de fins psychologues. Il aurait décidé de se défendre sur le même terrain que le Président américain et serait parfaitement de mèche avec les capitaines d’industrie. Côté éthique, la démarche ne serait pas très reluisante, mais côté machiavélisme, ce serait le premier prix.

 

La troisième conclusion est aussi une question

Si la démarche réussit et que nous obtenions une vraie diminution des taxes, quel prix les capitaines d’industrie ont-ils – si le Conseil fédéral était de mèche – ou vont-ils, dans le cas contraire, exiger pour leurs services ?

 

La quatrième conclusion rejoint la première mais sous forme également d’une question

Comment la politique va-t-elle pouvoir reprendre la main, car l’économie n’aime pas la démocratie qui lui fait perdre du temps et quelle crédibilité ont les « valeurs démocratiques » quand le président de l’Etat le plus puissant du monde qui se vante de sa démocratie est aussi officiellement et publiquement corrompu ?

 

5 thoughts to “Corruption à ciel ouvert”

  1. Maitre Donald sur un trône installé
    Brandissait un tableau affichant ses tarifs.
    Maitre horloger par le chiffre affolé
    Lui porta sa pendule conçue en or massif.
    À sa vue, le roi se pâme devant un tel joyau;
    Il ouvre un gros stylo et laisse tomber son taux.
    Ni honteux ni confus, et c’est là que tout change,
    Il sourit largement devant tant de louanges.

  2. Ces capitaines d’industrie sont exactement les mêmes qui licencieraient, avec effet immédiat, l’un de leurs employés si celui-ci se faisait soudoyer, ne serait-ce qu’avec une bouteille de champagne, par un fournisseur pour obtenir du travail en sous-traitance.

    Autrement dit faites comme je vous dis et non pas comme je fais

  3. Chère Madame Sandoz,
    C’est bien la première fois que je ne peux vous suivre complètement dans votre raisonnement. Je défendrais votre 2e postulat, soit que le Conseil fédéral a consulté les capitaines d’industrie. Nous savons depuis la rencontre offensante de la Présidente KKS et de M. Parmelin par M. Trump que celui-ci attendait de la Suisse que nos entreprises se délocalisent en partie aux USA. On ne peut nier l’importance de l’économie sur la politique. Si le Conseil Fédéral a discrètement fait pression sur lesdites entreprises pour qu’elles prennent elles-mêmes les devants, c’est de la realpolitik car tôt ou tard les entreprises auraient délocalisé partiellement leurs activités pour le marché américain.
    La presse a monté en épingle les cadeaux offerts, un lingot d’or et une montre Rolex … offrir cela à Trump n’a pas plus de valeur financière qu’offrir une bouteille de vin lorsqu’on est invité. C’est sous estimer Trump que de croire que c’est par à ces cadeaux qu’il a diminué les taxes. Pour le bien de la Suisse, je me réjouis d’une certaine connivence et d’un équilibre entre les autorités et l’économie. Bien cordialement
    Didier Beuchat

  4. Je ne vous suit absolument pas dans votre raisonnement et surtout dans vos conclusions!

    Ces Capitaines d’industrie sont des gens hors pair, ils ont été capables d’expliquer la Suisse et leurs industries au Président des Etats-Unis. Ce sont des commençants et aussi des industriels habiles, ils sont très fortunés justement parce qu’ils sont capables d’infléchir une décision stupide en le démontrant avec habileté. Les cadeaux ne sont rien au regard des bénéfices que tout notre Pays en retirera. Plutôt que de les critiquer vous devriez louer leur action qui réjouit tous les gens responsables de notre économie. Façe a eux le Conseil Fédéral n’est pas grand-chose.

    Je ne vois aucun problème éthique à faire quelques cadeaux ridicules au regard de l’avantage que cette baisse de taxe représente. Je ne pense pas non plus qu’ils vont exiger quoi que ce soit en échange, ils ont déjà gagné et sont vrament à leur place. Bravo à eux et à leur initiative. Certains d’entre-eux connaissent certainement déjà le Président américain en privé.

    Quant à la démocratie elle n’a rien à voir là dedans!

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